Portfolio : voyage voile & escalade dans les îles grècques du Dodécanèse
Alors que l’hiver fini par arriver sur les Pyrénées en ce début mars, une envie de soleil, de rocher colorés et de grandes envolées nous titille….
– Pourquoi pas les US?
– Ben ouais, tiens! Pourquoi pas?
Il n’en faut pas plus pour nous décider à prendre un billet d’avion pour Vegas. Au programme : grandes voies à Red Rocks et Zion!
Quelques dizaines d’heures plus tard, nous voici arrivés dans la plus grande machine à sous du monde, posée au milieu de nulle part : Las Vegas! Ben à part paumer son pognon, durement amassé pendant tout l’hiver, y a pas grand chose à faire à Vegas….donc nous filons vite à bord de notre campervan, direction Red Rocks National Park et son campground.
Le beau temps est au rendez vous, le climat aride, semi désertique, du sud Nevada contraste avec celui de nos Pyrénées encore bien arrosées de neige en cette fin d’hiver.
Nous passerons les premiers jours du trip à gravir quelques classiques faciles du quartier pour ce faire au style et au caillou.
Ici, à Red Rocks, le grès est dans l’ensemble très bon et surtout très prisu. Le vent y a sculpté une multitude de petits becs ou mini taffonis, tandis que la tectonique a fendu le grès de part en part offrant une grande quantité de fissures pour se protéger.
L’escalade est donc ici, à Red Rocks, particulièrement comestible pour nous autres européens, plus afficionados de la réglette en arquée que du ring lock dans une fissure fine….
Nous gravirons pour la chauffe Birdland, la classique facile (5.7) à Pine Creek Canyon.
Il vaut mieux partir tôt car cette face au sud peut vite se transformer en fournaise d’une part et mieux vaut être les premiers avant le monde d’autre part.
L’escalade y est facile et belle, le rocher est formidablement sculpté, alors qu’on ne le jurerait pas vu d’en bas. Idéal pour se remettre dans les tours de la pose de friends et reprendre les automatismes après l’hiver.
L’après midi nous irons voir Dark Shadows (5.8+), un peu plus loin et à l’ombre. Les contrastes thermiques entre ombre et soleil sont saisissants….Très belle voie qui se déroule sur un rocher noir, cuit au four…super solide et pourvu de bacs ce qui là aussi ne parait pas gagné d’avance lorsque on est au pied.
Puis nous irons faire un tour dans Black Velvet Canyon, gravir un collector de Red Rocks : Triassics Sands (5.10).
Pas très longue, 4 petites longueurs sur un mur raide et sculpté de petites réglettes. La dernière longueur offre un dièdre digne d’Indian Creek!
Autre collector, niché dans le Junniper Canyon : Crimson Chrysalis (5.8+)
La voie se déroule sur une aiguille de 300 mètres, remontant une fissure sur cinq longueurs dans une grande ambiance. Quelques longueurs de dalle bien protégées par des “bolts” et nous voici au sommet de la Cloud Tower. L’escalade y est variée, quelques verrous ne seront pas inutiles, mais le grès, là encore, est généreux et sculpté. Située en face N.O, la voie à l’ombre presque toute la journée est idéale pour les jours chauds.
Après cette bonne journée, un peu de repos n’est pas de refus. La visite des secteurs de falaise sportive permet de faire une bonne grasse mat (lever 7h au lieu de 5…ouah! dément!!) et de se réconcilier avec les cotations US…le rocher rouge de Calico Hills est admirable, le style souvent court péchon à base de plats et de règles.
Pour notre dernier jour à Red Rocks, nous retournons dans Black Velvet Canyon finir en beauté ce séjour dans “The Dream Of The Wild Turkey” (5.10). La voie se faufile dans un immense mur noir, un brin impressionnant, utilisant au maximum les systèmes de fissures pour 250 mètres d’escalade variée et toujours majeure!
Déjà la moitié du séjour…. En route pour Zion!
En trois petites heures de routes, nous voici à Springdale, petite bourgade aux porte du Parc. Le ravitaillement effectué, le camp posé, nous partons balader dans le canyon. Et là, stupeur!
L’érosion a taillé un canyon large, aux parois ocres et blanches avoisinant les milles mètres par endroit…grandiose! Des fissures parfaites rayent ces impressionnantes parois de part en part, les lignes sont pures, immenses, flippantes…
Ici on se sent petit.
Ici la Nature est grande.
L’escalade y est souvent sérieuse et pour notre premier séjour, nous commenceront par des voies courtes aux difficultés abordables.
Nous débuterons notre visite de ce temple de l’escalade par deux petites voies : Ataxia Tower (5.9) et The Headache (5.10) de deux et trois longueurs.
La première est idéale pour l’échauffement, variée, avec une longueur en fissure facile et l’autre en dalle.
The Headache, plus sérieuse (surtout pour nous autres, pauvres européens aussi à l’aise devant une fissure à verrous qu’une poule devant un mégot….) offre comme vous l’aurez compris une escalade couleur locale, grande classe.
Une fois passé les premiers mètres un peu déconcertants, on se fait au style et la magie du grès opère.
Les trois longueurs sont superbes, variées, avec un finish sous le sommet qui ne laisse pas indifférent.
Ce secteur orienté nord est parfait pour les jours chauds d’avril et, un peu frais en cette mi-mars. On ne pouvait pas dire que ça ne collait pas.
Le lendemain, lever aux aurores car la journée pourrait s’avérer longue : nous voilà parti pour gravir Iron Messiah, un must dans le 5.10 de Zion.
Une fois le socle gravi, une petite longueur en dalle puis une petite cheminée donnent accès à une terrasse au pied d’un immense dièdre.
La voie le suit ensuite sur près de 250 mètres. Fissures à main et cheminées se succèdent pour nous mener au sommet du Spearhead d’où la vue sur le canyon est fabuleuse.
La descente en rappel dans la voie compte dans la journée et il convient de bien faire attention à ne pas coincer la corde au fond de la fissure…
Pour notre dernier jour à Zion, nous partons grimper la seule voie sportive du canyon : Born to be brocken.
Comme son nom le laisse présager, cette voie, entièrement équipée, se déroule sur un mur sculpté de fines écailles et bossettes. Cinq belles longueurs mènent au sommet, les plus dures avoisinent le 6b.
D’une façon générale il convient de ne pas grimper après la pluie sur le grès, alors rendu très fragile et encore moins dans des voies aux prises délicates comme celle-ci.
Les voyages “Grimpe” aux U.S. sont parmi les plus dépaysants qui soit, bien que la vie soit globalement identique à chez nous.
La grimpe en fissure et qui plus est sur du grès est, pour nous européens, déjà un bon dépaysement : chamboulement du répertoire gestuel garanti.
Une touche d’aventure avec la dimension “grande voie” et vous épicez votre séjour!
Vous ajoutez à cela de grands espaces, une ville somme toute mythique et un climat semi désertique et vous pouvez reprendre l’avion comblé, votre soif d’exotisme étanchée.
Le vent d’Est qui s’était levé dans la nuit soufflait fort ce jeudi matin de septembre. Et le vent d’Est n’est jamais très bon pour le navigateur dans ce coin là de la Méditerranée. La mer, déjà agitée la veille au soir, ne doit pas être belle et c’est sans hésitation que nous décidons de laisser Pirates, notre voilier First 35 S 5, amarré au port de La Ciotat et d’attaquer notre périple grimpant par une voie au Cap Canaille.
Le Grec, ramenant l’humidité de la mer, n’est pas l’ami du grimpeur non plus et c’est dans une ambiance écossaise, plus que phocéenne, que nous démarrons la voie Grazie Amico au secteur Draïoun. Nous attaquons la voie dans un léger brouillard qui rend le rocher assez glissant. Les deux premières longueurs, sur un calcaire franc à bonnes règles nous réveillent bien et nous devons rester bien concentrés pour ne pas glisser.
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Nous voici maintenant au deuxième relais et voilà que je sens des gouttes tomber, alors que mes compagnons atteignent la vire d’où je les assure. Nous prenons quelques minutes pour évaluer la situation…la pluie s’arrête et voilà que le vent tourne. En quelques minutes, la chape de nuage enveloppant les Calanques et le cap se désagrège, l’air s’assèche et le soleil fini de sécher le rocher.
Les deux longueurs suivantes se déroulent sur un superbe grès blanc sculpté par le vent. Les taffonis nous offrent des prises généreuses et une escalade en trois dimensions des plus ludique.
Mes amis se délectent de l’escalade et du soleil qui désormais nous réchauffe bien.
Tout à coup, une odeur de tapas m’arrive aux naseaux…que ce passe-t-il? Aurions-nous été téléportés à Riglos? Et non…c’est la magie Canaille : passer d’une longueur de grès aux allures jordanienne à l’autre en poudingue digne des Mallos. J’adore…
Nous voici au sommet sous un soleil radieux. La mer s’est calmée, le ciel est d’un bleu azur, nous allons pouvoir rejoindre le bateau et appareiller. Ce soir nous pourrons dormir au mouillage dans une Calanque.
Nous prenons la mer en fin d’après-midi, longeons le Cap Canaille où nous grimpions quelques heures plus tôt et arrivons dans la Calanque d’En Vau à la tombée de la nuit. Une légère houle d’Est entre encore dans la Calanque. Finalement, nous dormirons sur une bouée dans la calanque de Port Pin, toute proche et mieux protégée de l’Est.
Au petit matin, nous naviguons vers En Vau, direction la falaise de Castelviel et ses parois plongeant dans la Grande Bleue. Nous grimpons jusqu’à la Brèche de Castelveil d’où la vue plongeante sur la calanque de l’Oule est magnifique. Puis nous gagnons le plateau, longeons la falaise à l’Ouest pour trouver les lignes de rappel : une cordée ira dans Rêve de pierres, tandis que l’autre grimpera Vide et Eau.
Les deux voies choisies aujourd’hui ont la particularité de démarrer presque au ras de l’eau. La verticalité des lieux associée à la mer confère une atmosphère toute particulière à ces escalades.
La mer est calme aujourd’hui et un léger Mistral nous assure collance et ciel bleu. L’escalade sur ces beaux murs de calcaire blanc, aux fines sculptures et à l’adhérence exceptionnelle, est un pur bonheur. Nous gagnons le plateau sous un vent fraîchissant.
De retour au bateau, un petit bain de mer pour se délasser et nous mettons les voiles vers la calanque de Sormiou où nous mouillerons pour la nuit.
Nous quittons tôt le bateau le lendemain matin et en deux rotations d’annexe, nous voici tous débarqués au pied du Bec de Sormiou. Ce cap emblématique des Calanques marseillaises plonge ses falaises blanches et ocres de 150 mètres dans les profondeurs azurées de la Méditerranée. Nous y gravirons des voies moins soutenues que la veille, Les Traces du Passé et L’Antécime où tout le monde pourra grimper en tête. L’équipement y est excellent et le calcaire généreux.
Le soir, poussé par un bon Mistral, nous rentreront à La Ciotat sous genois seul, à plus de huit noeuds! Le vent va être fort ce soir et c’est solidement amarrés dans le port vieux de la ville que nous passerons la nuit, bercés par la musique étrange du vent dans les mats et les haubans.
Pour notre dernier jour, nous choisissons des voies assez courtes dans le beau secteur de grès brun à l’autre extrémité du Cap Canaille : le secteur Ouvreur de bouses.
Le rocher y est incroyablement sculpté, les voies auraient pu être ouvertes par des bédouins…le dépaysement est complet!